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LES COMBATS DE SARTENE
 
 


Du 10 au 14 septembre, les Allemands, redoutant un débarquement imminent des Alliés, tentent d’évacuer en hâte leur matériel du Sartenais vers la côte orientale en vue de la retraite sur Bastia. Le 15, voyant qu’ils ont toujours affaire aux Corses seuls, ils veulent, par la possession de l’important nœud routier de Lévie et de la route stratégique qui le relie â la côte, protéger les cols de Bacino, de l’Ospedale et de Bavella et amorcer une offensive sur Ajaccio. L'action meurtrière des patriotes va déjouer leurs plans.

Le 9 septembre au matin, le Comité d'arrondissement de Sartène est réuni au lieudit Fontaine de joseph, dans la plaine de Pagna, à 10 kilomètres de Sartène. Il y a la, autour de joseph Tramoni, Noël Galéazzi et Antoine Quilichini, tous les responsables militaires cantonaux.
La décision est prise d’attaquer les Allemands le lendemain à dix heures du matin. Les membres du Comité d'arrondissement passent par Bilzese, où un parachutage est en cours, lorsqu’ils apprennent, par le séminariste Hyacinthe Quilichini, arrivé d’Ajaccio, la victoire de l'insurrection au chef-lieu du département. En même temps, Hyacinthe Quilichini leur remet les directives du Comité départemental. On retourne au P.C. à Foce où la décision d’occuper Sartène le 10 est arrêtée.
Le lendemain matin s’opère le rassemblement des patriotes du canton. A 14 heures, une colonne de quatre cents hommes en armes s’ébranle derrière les responsables du F. N., au milieu desquels Hyacinthe Quilichini porte fièrement le drapeau tricolore. A 16 heures, elle est aux portes de Sartène où un groupe de gendarmes lui présente les armes et se joint à elle.
Au milieu des acclamations d’une population enthousiaste, les patriotes défilent à travers la ville. Un grand meeting rassemble cinq mille personnes sur la grande place, aussitôt baptisée «place de la Libération».
Antoine Quilichini, porte-parole du Comité, d’arrondissement, fait approuver les décisions du Front National; destitution du sous-préfet vichyste, qui a pris la fuite, et désignation de Noël Galéazzi pour le remplacer; destitution de la municipalité vichyste et ratification du nouveau conseil municipal avec joseph Tramoni à sa tête; dissolution des organisations fascistes, arrestation des traîtres, mobilisation générale.
Des sections en armes, sous le commandement de l’adjudant-chef Antoine Paganelli, sont mises en place aux accès de la ville. A 16 h 30, le Comité d'arrondissement (1), érigé en conseil de sous-préfecture, prend ses fonctions.
Mais les «collaborateurs» n’ont pas dit leur dernier mot. Ils ont dissimulé dans leurs demeures des soldats allemands. A 17 heures, une fusillade nourrie éclate en divers points de la ville. Dans tous les quartiers, une violente bataille de rues s’engage entre les patriotes et les Allemands. Lutte inégale, car  Sartène patriote est debout contre l’envahisseur.
Paul Natali cause de lourdes pertes à l’ennemi avec ses trois fusils-mitrailleurs. Les autres chefs de section, Toussaint Cianferani, Simon Bianchini, le chef de groupe Pierre Tramoni et un fusilier-mitrailleur italien font merveille dans un combat où se distinguent de nombreux patriotes (2).
L'ennemi entasse soixante morts dans six camions et ramasse soixante-dix blessés. Du côté des patriotes, deux morts: Jacques Nicolaï et joseph Tafanelli, et onze blessés (3).
Mais voici du renfort pour les Allemands. A 18 heures, des chars postés place Saint-Damien ouvrent le feu sur la ville au canon de 77, tandis que, de la caserne Archinard, l'assaillant tire à la mitrailleuse et au mortier.

 


Afin d'éviter des pertes parmi la population civile, le Comité d’arrondissement décide de lui faire évacuer la ville, tandis que les combats de rue redoublent d’acharnement. La nuit est venue. Le Comité d'arrondissement regroupe tous les patriotes au col de Tipponi. L'artillerie ennemie suit de son feu le mouvement de repli.

Le Comité d'arrondissement et le conseil municipal s’installent à l’école de Granace. Ils organisent le ravitaillement des évacués. Des détachements de francs-tireurs s’emparent des dépôts de vivres italiens de Sartène

Des le 11, le lieutenant Cucchi, appelé au commandement, prend des dispositions offensives. Évitant le contact, les Allemands se replient sur Bonifacio après avoir fusillé cinq patriotes: Jean-Simon Codaccioni, de Bilia, Antoine Loï, Vanni Lemire, le père franciscain Nicolas Borner, qui revenait de dire une messe d’enterrement à Giunchetto et l’abbé Bytonsky (4) curé de Fozzano, et fait sauter leur dépôt de munitions de Tivolaggio, endommageant l'église du village (5).
Le 12, Toussaint Pompa détruit près de Figari un dépôt de munitions abandonné par les Italiens et dont les Allemands allaient s'emparer..
Le 13, un convoi de sept side-cars et deux camions, déjà pris à partie entre le pont de Figari et Scopetto par le groupe Pompa-Ferracci de Figari qui lui a tué six hommes et lui a fait de nombreux blessés, est stoppé à deux kilomètres de Sartène par le groupe Galeazzi (Félix, Jean-Dominique et François).
Le 14, verrouillage des deux routes d’accès, à Gianouccio (25 hommes), Giuncheto (5 barrages) et Rocapina (2 F.M.).
Sept groupes de Monaccia (45 hommes), responsable militaire Don Jacques Natali, et 86 patriotes de Figari tiennent les positions.
Dans l’extrême-sud, à Pianotoli-Caldarello, aux avant-postes de Bonifacio, où sous la conduite de Pierre Quilichini et Paul Santarelli, 56 patriotes font face à l’ennemi, Jean Giafferi, d’Aullène, tombe le 14 septembre.
Le 15, le Comité d’arrondissement reçoit la visite de Pagès, reprend possession de la ville de Sartène, procède à l'arrestation des traîtres qui y sont demeurés, lance un appel à la population afin qu’elle regagne ses foyers. Il continue à informer les responsables militaires cantonaux et à diriger le combat dans tout le sud de l’île.
Derrière la ligne Sartène·Zonza qui marque la limite extrême de la poussée allemande, à Olmeto, Aullène, Zicavo, à Petreto-Bicchisano, à Sainte-Marie-Sicché et dans toute la vallée de l’Ornano, à Sollacaro et à Cauro, des centaines et des centaines de patriotes interdisent à l’ennemi tout espoir d'atteindre Ajaccio.

Maurice Choury. "Tous bandits d'honneur". Ed. Piazzola 2011. p.143

(1) Composé de joseph Tramoni, Noël Galeazzi, Antoine Quilichini, Antoine Paganelli, Antoine Benedetti, Pierre Rocchiccioli, Toussaint Mary et Jean Leandri
(2) Notamment Antoine Giacometti, François Sérini, le gendarme Giorgi, PaulMondoloni, Sylvestre Sorba, Jean Galeazzi, Jeannot Tafanelli
(3) Notamment Antoine Giacometti, François Sérini, le gendarme Giorgi, PaulMondoloni, Sylvestre Sorba, Jean Galeazzi, Jeannot Tafanelli
(4) L’abbé Bytonsky, sujet polonais, avait été expulsé d’Alsace au moment de l’annexion en 1942. Arrêté le 10 septembre à Arbellara pour faits de résistance, il a été fusillé le soir même à Quenza. Il est inhumé au cimetière de Fozzano.
(5) Douze ans après l’église n’est pas encore réparée, le budget communal ne permettant pas de réaliser les travaux


 
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Illustrations de Fontanarossa
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